Le trouble anormal de voisinage, remède aux petits tracas des copropriétés en été ?

Le trouble anormal de voisinage 21 août 2021

 La vie en copropriété n’est pas toujours un long fleuve tranquille, particulièrement durant la saison estivale. Fêtes bruyantes, barbecues à répétition, ordures déposées dans les parties communes… les sources de conflits sont nombreuses dès lors que les occupants manquent de respect pour leurs voisins. Pour rétablir l’ordre, en l’absence de réglementation dédiée, les juges s’appuient sur la notion de trouble anormal de voisinage. Explications et exemples concrets.

 

 

Que dit la loi concernant le trouble anormal de voisinage ?

 

En réalité, pas grand chose, si l’on s’en tient aux textes légaux. En effet, si le Code civil énumère différentes responsabilités dans ses articles 1240 à 1244, celles-ci s’appliquent aux cas de dommages matériels causés aux voisins par les enfants, les animaux ou encore les bâtiments mal entretenus.

En pratique, c’est donc la jurisprudence de la Cour de cassation qui a peu à peu érigé, dès 1986, la notion du trouble anormal de voisinage en s’appuyant sur le principe selon lequel « nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ». Désormais évoqué dans différentes situations, le trouble anormal de voisinage peut s’appliquer à diverses situations.

 

 

Catégories et exemples de troubles anormaux de voisinage

 

Les tribunaux ont défini trois principales catégories de troubles anormaux de voisinage :

 

– le trouble anormal de voisinage visuel

Il couvre les situations dans lesquelles la vue d’un résidant est occultée ou dégradée. Un amas de débris ou un amoncellement de ferrailles peut-ainsi être considéré comme un trouble anormal de voisinage.

Dans le même esprit, la perte d’ensoleillement causée par un arbre ou une haie peut également être considérée par les juges comme un trouble anormal de voisinage.

 

– le trouble anormal de voisinage olfactif

Les tribunaux peuvent en effet considérer que les odeurs constituent un trouble anormal de voisinage. Celles-ci peuvent provenir de fumées, d’ordures ou d’installations animales.

A noter, l’utilisation du barbecue, n’est pas considérée comme un trouble anormal de voisinage. Mais le règlement de copropriété peut interdire l’utilisation du charbon de bois, du gaz ou de l’électricité ou poser des limites horaires. En cas de risques d’incendies dans les régions sensibles, les autorités locales peuvent également interdire les barbecues pendant la saison estivale.

En revanche, un emploi abusif (horaires, proximité des voisins) peut constituer l’infraction, à condition que les plaignants rassemblent des preuves telles que les photos de noircissement d’une paroi. Si une mise en demeure ne suffit pas à raisonner le voisin adepte de barbecues, le recours à un conciliateur, voire au tribunal, peut être envisagé.

 

– le trouble anormal de voisinage sonore

La réglementation locale encadre les cas de nuisances sonores liées à l’utilisation des outils motorisés de jardinage et de bricolage. Ainsi, l’usage des tondeuses et autres tronçonneuses est généralement régi par des arrêtés préfectoraux ou municipaux.

Pour ce qui est des cris d’animaux, et particulièrement le chant du coq qui fait souvent l’objet d’affaires médiatisées, la loi du 29 janvier 2021 a institué la notion de patrimoine sensoriel en érigeant les « sons et odeurs » au rang de caractéristiques des espaces naturels.

Mais durant l’été, c’est principalement le tapage nocturne qui perturbe la tranquillité des voisins. Si l’un de vos voisins organise des fêtes un peu trop bruyantes, vous pouvez solliciter votre syndic afin qu’il lui rappelle les termes du règlement de copropriété, au besoin, avec une mise en demeure de faire cesser le trouble. A défaut de rétablissement de la situation à la normale, le recours gratuit à un conciliateur de justice vous permettra peut-être de trouver un accord à l’amiable. Enfin, si rien n’y fait, vous pourrez saisir le tribunal pour trouble anormal de voisinage. La fréquence, la durée, l’intensité et la localisation de la nuisance seront autant de critères utiles pour aider la justice à trancher le litige. Récemment, une société s’est même vu provisoirement interdire la location saisonnière d’appartements à Paris sur le fondement du trouble manifestement illicite au sens de l’article 835 du code de procédure civile.

 

 Quoi qu’il arrive, dans la mesure du possible, il est toujours préférable de résoudre ces tracas à l’amiable, histoire de ne pas gâcher les vacances ! Mais si vos démarches restent vaines, sachez qu’un tribunal pourra vous aider à faire cesser les troubles, voire même à obtenir des dommages et intérêts.