Ce samedi 5 mars, la CAPB (Communauté d’agglomération du Pays Basque) a entériné la mesure dite “de compensation” destinée à contrer l’explosion des locations saisonnières au Pays basque. Envisagé comme une solution efficace pour préserver le parc locatif à l’année par ses défenseurs, ce dispositif est décrit comme une atteinte au droit de propriété par ses opposants. Focus.
L’explosion des locations saisonnières au Pays basque
En octobre 2021, l’AUDAP (Agence d’urbanisme Atlantique et Pyrénées) a publié un rapport pour le compte de la communauté d’agglomérations. Il en ressort notamment :
- une augmentation de 130% du nombre des locations saisonnières entre 2016 et 2020 ;
- une large part de résidences secondaires au Pays basque Nord (40 000 sur 198 000) ;
- un nombre important de logements vacants (12 000) ;
- un total de 52 000 logements inoccupés à l’année ;
- plus de 16 000 locations saisonnières en 2020, ce chiffre atteignant plutôt les 23 000 selon Alda, une association locale de défense des droits qui évoque les nombreux logements proposés sur les plateformes de location en ligne ;
- un nombre d’annonces de locations rapporté au nombre de résidences principales de 11 %, soit plus qu’à Paris, Marseille ou Nice.
Géographiquement, ce phénomène se concentre sur la zone la plus tendue du marché local, à savoir la côte, et notamment le trio Bayonne-Anglet-Biarritz auquel se joint Saint-Jean-de-Luz. Mais les 24 communes sont concernées selon l’étude. Ainsi, “la tendance plus récente est le développement de ces locations sur les communes du Sud telles qu’Hendaye, Bidart et Guéthary” ou encore “dans les communes de la zone rétro-littorale où l’on peut supposer que le manque d’offres sur la côte, par rapport à la demande, a ouvert des perspectives” selon Lauriane Belloy, une doctorante qui a travaillé à ce rapport complet.
Zoom sur la mesure de compensation
Pour pallier le même type d’évolution en contrant les plateformes telles que AirBnB, de grandes villes comme Paris, Lyon et Nice ont mis en place un système de compensation. En 2018, Bordeaux a sauté le pas en imposant à son tour une compensation au changement d’usage de l’habitation.
Pour rappel, certaines communes très touristiques exigent une déclaration de changement d’usage des résidences secondaires proposées à la location saisonnière. Ce préalable est désormais assorti d’une obligation de compensation. En clair, si un propriétaire déclare un changement d’usage d’un local A en meublé de tourisme, il doit concomitamment transformer un local B en logement dans la même zone.
Samedi, les autorités locales ont donc validé cette exigence pour les 24 communes du Pays basque. Les propriétaires de résidences secondaires devront, à compter du 1er juin prochain, proposer un nouveau logement équivalent dans la même commune, pour toute habitation transformée en meublé de tourisme.
Dans la mesure où cette compensation est matériellement impossible, le parc immobilier étant insuffisant pour sa mise en pratique, il est difficile de prévoir les effets de cette nouvelle exigence.
Du point de vue des propriétaires de résidences secondaires concernés, deux solutions se présenteront si la compensation n’est pas possible :
- proposer le logement en location à l’année ;
- vendre le logement.
Les effets incertains de la compensation
Pour les défenseurs de la compensation, ses effets seront donc doublement vertueux puisque des logements devraient réintégrer le parc locatif à l’année, sans nouvelle artificialisation des sols.
Reste à savoir à quels montants de loyers et à quel prix ses logements seront loués ou vendus. Les bailleurs qui avaient inclus ces résidences secondaires dans un plan de financement seront tentés d’exiger de loyers élevés face à ce soudain manque à gagner. Et en cas de vente, des acquéreurs seront toujours prêts à acheter à des prix très élevés au regard du succès grandissant de la Côte basque.
Les grandes plateformes de location saisonnière en ligne dénoncent quant à elles une “réglementation qui viole le droit fondamental des propriétaires à disposer de leur bien au nom d’un intérêt général supérieur qui est celui du logement”. Des recours seront d’ailleurs probablement déposés prochainement.
(Sur le même sujet, nous évoquions l’an dernier multiplication des locations saisonnières comme une source croissante de conflits de voisinage.)
A noter, les propriétaires de résidences principales qui en louent tout ou partie, dans la limité de 120 jours par an, ne sont pas concernés par ce changement de réglementation qui devrait faire beaucoup parler dans les semaines à venir.